Space Marine Battles: L'Œil d'Ezekiel de CZ Dunn

— Pourquoi avoir menti au grand maître Danatheum ?
Ezekiel rouvrit les yeux. Il ne s’était pas aperçu de l’entrée de Turmiel dans la pièce.
— Tu es là depuis longtemps ? lui demanda-t-il.
Ses robes étaient trempées de sueur, qui goutta sur le sol froid quand il se releva et fit face au bibliothécaire.
— Assez longtemps pour vous entendre dire au maître archiviste que votre combat avec le démon ne vous avait pas changé.
Le visage de Turmiel ne laissait transparaître aucune émotion. Il regardait Ezekiel droit dans les yeux, mais semblait pourtant fixer un point indéterminé.
— Ce n’était pas un mensonge, mentit à nouveau Ezekiel.
— Vraiment ? La voix de Turmiel était aussi dénuée d’émotion que l’était son visage sous sa capuche. Dans ce cas, servez-vous de votre don de vision et dites-moi ce que je vais dire.
Ezekiel agit si rapidement que le bibliothécaire ne put réagir. Il se jeta en avant, posa son avant-bras sur la gorge de Turmiel, puis le força à reculer contre la paroi chargée de cristaux de glace. Le jeune psyker ne réagit même pas.
— Depuis combien de temps le sais-tu maudit ? cracha Ezekiel.

— Quelque chose vous amuse, épistolier ?
— Absolument rien, frère, répondit Ezekiel d’un air plus grave. Il promena son regard sur le sergent, de la tête aux pieds, comme s’il l’examinait. Dites-moi, reprit-il. Pourquoi nous détestez-vous autant, moi et mes frères du librarius ? Avez-vous peur de nous, Balthasar ?
— Je n’ai pas peur de vous, épistolier, ni de nos frères psykers, lâcha Balthasar en plantant son regard dans celui d’Ezekiel. Mais je n’ai pas confiance en vous.
— Ah oui ? Et pourquoi ? Vous ne pensez pas que nous ayons à cœur le seul intérêt du chapitre ?
— Je pense que vos intentions sont sincères, mais au bout du compte, vos semblables et vous êtes des vecteurs du warp, et personne ne peut faire confiance au warp.

— Je vous en prie, continuez, archimagos, l’invita Serpicus. J’aimerais comprendre ce qu’il y a de si spécial concernant l’archéotechnologie de cette planète au point que non seulement Mars ait invoqué le Pacte de Kulgotha, mais ait aussi tenté de corrompre l’un de ses anciens étudiants pour en assurer la survie.
Diezen commença à reculer.
— Ce sont mes maîtres sur Mars qui ont insisté pour que nous nous garantissions votre assistance grâce au pacte, mais ils ne savent rien de cette séquence filmée. Elle est tombée entre mes mains par…
Le technoprêtre n’alla pas plus loin, le servobras de Serpicus le saisit par le cou et le souleva au-dessus de la rambarde. La chaleur du creuset était si intense que les semelles de métal sous les pieds de Diezen commencèrent à rougir et à fumer.
— Qui d’autre est au courant au sujet de cette séquence ? Qui d’autre ?
— Personne ! J’ai prélevé moi-même cette tablette de mémoire de la carcasse d’un Kastelan. Aucune autre âme vivante ne l’a visionnée, et personne même ne sait qu’elle existe.
— Par conséquent, si vous mourez, tout ça partira avec vous ?
— Oui, je…
Les yeux et la bouche de Diezen s’ouvrirent en grand quand il comprit.
— Merci. C’est tout ce que j’avais besoin de savoir.
Et la griffe de Serpicus relâcha sa prise.

Ladbon serra le poing, bien décidé à lui faire rencontrer le nez de Kowalski, mais il eut une vision fugitive de ce qui se passerait ensuite. Sa main se relâcha et laissa le futur suivre un chemin différent.
— Et qui es-tu pour insulter mes hommes ? Regarde les tiens ! reprit Kowalski en pointant chacun des membres de l’escouade de Ladbon. Un albinos, un muet, un gars assez gros et moche pour laisser deviner qu’un de ses parents était un ogryn, des jumeaux si bêtes qu’aucun des deux n’admettra jamais qu’il est le plus jeune, si bien qu’ils se sont retrouvés tous les deux embarqués au service de l’Empereur. Quant à ça, je ne sais même pas de quoi il s’agit.
Grigori et Gaspar retinrent Allix avant qu’il ne commette l’irréparable.
— Et puis il y a toi, continua Kowalski en reportant son attention sur Ladbon. Le second-né d’un chasseur de vermine d’une ruche de seconde zone, qui, d’une manière incompréhensible, s’est retrouvé avec des galons de capitaine. J’aurais probablement un peu d’admiration pour toi si ta promotion ne s’était pas faite au détriment d’une autre personne plus méritante. Dis-moi, second-né, ta famille et toi mangiez ces rats après les avoir tués ?
Les rires des deux lieutenants virent rejoindre ceux de leur capitaine.
— Je répondrai une fois que vous m’aurez dit s’il est vrai ou pas que votre mère est également votre sœur, lâcha Ladbon.
Les rires s’arrêtèrent net. Kowalski prit quelques secondes pour comprendre les implications de ce que venait de dire Ladbon. Ensuite, il fit un pas de plus vers l’autre capitaine, ses joues empourprées de colère.
— Tu paieras pour ça, bon à rien.

— Tu peux me faire confiance, Ezekiel, tu es bel et bien mort, répondit le démon. Ces choses que je t’ai montrées ? Certaines me bénéficieraient grandement si elles se réalisaient, alors que d’autres me causeraient des torts irréparables.
— Mais certaines se sont déjà produites. Les bénéfices et les torts sont déjà acquis.
— Oh, on peut facilement altérer le passé, tu sais. Si tu avais été capable de sauver le Lion, alors les dix millénaires suivants auraient été très différents, expliqua le démon dans un léger ricanement. Il est tout aussi aisé de confondre le passé et le futur, surtout quand ils peuvent se mêler l’un avec l’autre.
— Es-tu seulement capable de donner une réponse claire ? s’agaça Ezekiel. Qu’est-ce que tout cela a à voir avec moi ?
— J’ai besoin que tu fasses quelque chose pour moi, Ezekiel.
— Plutôt mourir que de t’aider, démon.
— Ça, c’est déjà fait, à moins que tu n’aies oublié ce petit détail ? Ce dont j’ai besoin t’aidera aussi, Dark Angel.
Les créatures du warp étaient très proches. Ezekiel ne pouvait pas jouer avec le démon plus longtemps.
— Et qu’as-tu besoin que je fasse ?
— N’est-ce donc pas évident, Ezekiel ? Toute frivolité et malice avaient disparu de la voix du démon. J’ai besoin que tu vives.

Ezekiel ne fit preuve d’aucune pitié et se jeta sur son ennemi. Il le saisit par la tête alors qu’il tombait et remonta son genou blindé à la rencontre de celle-ci. Le premier coup de genou brisa l’une des défenses, le deuxième lui écrasa le nez dans une giclée de sang, le troisième brisa une pommette et l’enfonça profondémentdans le visage.
L’archiviste ne s’arrêta pas là. Un quatrième coup de genou, puis un cinquième et un sixième suivirent, chacun d’eux déformant un peu plus les traits déjà malformés de l’ork. La deuxième défense céda en même temps que la plupart des dents, et la bête toussa en les avalant avec une bonne rasade de sang et de débris d’os. L’ork ne montrait plus aucune résistance, qui sait s’il était au bout de son endurance ou si tout esprit combatif l’avait abandonné, mais Ezekiel ne s’arrêta pas.
Au vingtième coup, l’ork était mort, mais Ezekiel insista encore et les coups continuèrent de pleuvoir. Ce qu’il restait du crâne de l’ork finit par éclater et la petite cervelle alla s’écraser au sol, là où la neige avait fondu sous la chaleur du sang versé.
Satisfait, enfin, Ezekiel saisit le cadavre par ce qu’il restait du cou et le jeta en direction des membres de la bande.

Balthasar tenta de libérer son arme, mais l’ork leva son autre bras, saisit le Dark Angel à la gorge et serra. Le space marine préféra lâcher son arme, dont les moteurs mis à mal finirent par s’arrêter, et tenta de faire lâcher prise à cette main qui lui enserrait le cou.
— Les space marines y peuvent voler ? commenta le chef de guerre en levant le sergent au-dessus du vide, au-dessus de la cité.
Il le maintint ainsi pour que ses troupes en bas puissent le voir. En réponse, elles poussèrent des acclamations et chantèrent le nom de leur chef. L’ork sourit, ses dents et ses défenses brisées trempées de son propre sang, puis brandit le gantelet énergétique qu’il avait arraché au chapelain.
Balthasar s’attendit à ce que s’abatte le coup qui devait le tuer et fut tout surpris quand le gantelet passa dans son dos pour lui arracher ses réacteurs dorsaux au lieu de lui écraser le visage.
— Maint’nant, le space marine va vraiment voler, ajouta le chef de guerre dans un petit ricanement.
Puis, il balança Balthasar en direction de la meute qui attendait en contrebas.