[Portrait de Noël 2015] Alrik

Une vie de mort

La porte allait céder. Chaque martèlement s'accompagnait des grognements et des gémissements de somnambules de la horde qui s'était amassée dans leur sillage. Aucun but ni aucune volonté ne les guidait, seulement le souvenir confus d'une vie achevée : le besoin irrépressible de mâcher la chair et les os des vivants. Ces cadavres cessèrent soudain de griffer la porte et restèrent un moment, le regard vide, avant de s’écrouler, la  magie les animant les ayant quittés, soufflée hors de leur corps. Une silhouette imposante sortit alors d’une ruelle non loin, ressemblant de prime abord à un chasseur de sorcière dans son long manteau de cuir rougi, un sabre du plus pur style de Cathay accroché à son dos et un pistolet à répétition à la ceinture. Mais son regard perçant sous son chapeau dénotait une âme guerrière et une sagesse ancestrale qu’un chasseur ne pouvait qu’envier. Son teint pâle pouvait laisser penser qu’il ne sortait pas souvent de ses habits-ci, mais il n’y avait pas pire erreur de jugement.

« Vous pouvez sortir, ils ne vous poseront plus de problèmes »

L’individu parlait un Reikspiel parfait, avec un léger accent du sud-est de l’Empire. Il accueillit les paysans terrifiés qui sortirent de la maisonnée et les invita à plutôt se regrouper dans la maison du duc régnant sur la ville. En les suivant du regard alors qu’ils détalaient, plus effrayés par son apparence que rassurés, il aperçut l’orbe maladif de Morrslieb planant juste au-dessus de l’horizon, tel l’œil d’une entité malsaine contemplant ses enfants et leurs oeuvres. L’homme repensa alors à cette nuit, où la lune verte avait lui de la même façon, cette nuit où il avait failli perdre son peuple.
Il continua de libérer les paysans de leurs foyers assiégés par les cadavres de leurs anciens voisins ou de leur propre famille, tout en ayant l’esprit ailleurs, remarquant que les similitudes ne consistaient pas qu’en la présence de Morrslieb. Le contexte était également le même : les morts ne connaissaient plus le repos auquel ils avaient droit, l’orbe vert influençant la puissance des vents de magie, les faisant s’infiltrer toujours plus profondément pour ranimer ce qui avait cessé de bouger il y a des siècles. Cela le laissa penser que celui qu’ils pensaient avoir anéanti avait refait surface, d’une façon ou d’une autre.

« Alrik ! Tu t’en sors ? »

Une voix féminine brisa la réflexion de l’homme, et il regarda dans sa direction.

« Tu ne me penses pas capable de venir à bout de zombies ? je ne suis pas l’un d’eux tu sais, Freya »

La demoiselle qui l’avait interpellé ne put retenir un petit rire en l’entendant réagir à sa taquinerie. Elle semblait jeune, quoiqu’un peu plus vieille que lui, mais avait la même sagesse dans le regard, qui laissait supposer qu’elle n’avait pas l’âge qu’on lui prêtait. Sa chevelure flamboyante tombait en cascade de ses épaules jusqu’à ses hanches féminines, mais taillées par le combat à cheval. Tout dans ses gestes démontrait la précision et l’économie de mouvement amenées par les nombreux combats.
Alrik l’avait toujours connu comme sa reine, l’Indomptable, que même l’Homme-Dieu n’avait pas pu soumettre complètement. Même sa tenue amenait l’ennemi à essayer de la blesser. En effet seules les parties de son corps les plus intimes étaient protégées d’écailles de métal, ce qui ne l’handicapait pour rien au monde. Car à quoi bon rajouter une plaque de métal qui va nous ralentir et rendre nos mouvements plus patauds, quand nos gestes vifs et agiles nous gardent hors de portée de tout ennemi ?

L’homme approcha de la demoiselle et scruta les environs, ne percevant plus la présence d’âmes tourmentées dans leur trépas, il hocha doucement la tête, satisfait.

« Le village est en sûreté…pour l’instant »

Alrik avait vu bon nombre de guerres, et pas du genre à mériter d’être transcrites dans les livres d’histoire. Il savait donc que si une véritable armée de morts arrivait ici, les paysans seraient balayés, c’est pourquoi il avait enjoint le duc à préparer un convoi civil pour la capitale du comté. Bien qu’il ne soit pas retourné à la cité de Nuln depuis des décennies, il ne doutait pas qu’elle soit toujours aussi bien défendue qu’alors.
Freya, à ses mots, avait appelé leurs montures, qui semblaient parfaitement anodines si l’on négligeait leur robe noire de jais et leur haleine de chair décrépite, mais quiconque le remarquait avait l’instinct de ne pas s’en mêler. Ils retournèrent ainsi dans leurs domaines d’origine, les plaines fertiles des Asobornes, connues en cette époque comme le Stirland. Le destin, dans son cruel sens de l’ironie, avait fait de la Sylvanie voisine la région d’adoption des vampires responsables des Guerres Vampiriques, causant des milliers de morts et de la réputation de monstre des vampires.
Certes Alrik n’avait pas non plus à son époque porté les non-morts dans son cœur, mais on lui avait forcé la main…

Au fil du retour, sous les soubresauts du chemin accidenté, il se remémora une énième fois sa vie, il y a des millénaires de cela…
Les cavalcades, les cris sauvages, les charges dévastatrices, une vie en selle, puis les ombres, les vents murmurant, les morts inapaisés, les attaques soudaines et enfin le marché…
Il y repensa encore avec amertume, se perdant dans ce souvenir indélébile, désormais plein constituant de son être.
Le vampire était venu en leur demeure, les avertir que son maître viendrait  tous les tuer, mais qu’il existait un moyen de tous les sauver. Alrik avait de suite accepté malgré les protestations de ses pairs. Peut-être sa fougue et sa naïveté l’avaient elles aveuglé, mais il pensait le vampire honnête. Il apprit de son erreur dans la douleur, la douleur de la mort, puis la douleur morale de comprendre son destin et sa nourriture. Il avait réussi à se contenter d’animaux sauvages mais sa soif n’était jamais tarie et rapidement les forêts environnantes se dépeuplèrent et il partit, pour ne pas affaiblir les siens, endurant la douleur agonisante du soleil tant qu’il le pouvait, sa volonté alimentée par son envie de vengeance et sa loyauté à Freya. Il s’adapta bien vite à sa nouvelle « vie » observant ses anciens camarades durant la nuit, se cachant d’eux durant le jour. Il les revoyait se préparer au combat, les chevaux étant ferrés, les lances aiguisées et les faux des chars accrochées.
Alrik regarda Freya et la revit lors de sa sortie à la tête de son armée, aussi resplendissante que maintenant, voire plus. Mais il n’avait pu la suivre qu’à distance, pour ne pas succomber à cette soif impie qui l’habitait. Il vit donc rapidement que tous les rois avaient connus les mêmes soucis d’attaques de morts et il semblait que le responsable approchait. A la surprise d’Alrik, il rencontra également quelques guerriers de la nuit, comme lui, qui avaient aussi naïvement cru pouvoir sauver leur peuple. Mais ils se sont convaincu mutuellement que cette opportunité approchait : si ils aidaient leurs peuples, ceux-ci les accepteraient peut-être à nouveau parmi eux. C’est ainsi que la bataille contre celui connu plus tard comme Nagash débuta. Alrik et ses nouveaux camarades se battant sur les flancs et dans l’ombre des 2 armées, traquant les responsables de leur sort les uns après les autres, tous ensembles. Ainsi leur inexpérience de leurs nouveaux pouvoirs fut compensée par leur nombre et leur maitrise de différents types de combats. Ils fauchèrent tant d’anciens camarades tombés et ramenés des domaines de Morr qu’ils se refusèrent à les compter, mais ils n’hésitaient pas à se gorger du sang de leurs tourmenteurs en hurlant leur victoire à chaque vampire achevé.
La bataille prit fin, et tous entendirent les mots de Sigmar, leur Roi, celui qui marquerait l’histoire de son Empire comme ayant vaincu un dieu. Ils acceptèrent résolument ce jugement et repartir sur leurs terres d’origines pour s’y fabriquer un abri, pour veiller sur les leurs en restant cachés à leurs yeux, ce que fit Alrik sans la moindre hésitation. Il vit ainsi son peuple continuer de prospérer, et veilla sur sa reine jusqu’à son trépas. Mais il s’était depuis longtemps refuser de la voir défaillir aussi facilement et ,peu de temps avant sa fin, il avait décidé de se dévoiler à elle, lui offrant le même marché que ce démon buveur de sang lui avait proposé des décennies plus tôt. Mais il l’avertit des conséquences, qu’elle ignora, souhaitant continuer à parcourir les plaines de son pays à cheval, ce qu’Alrik ne pouvait lui refuser.
Ainsi après la mise en terre de sa reine, il s’assura qu’elle puisse sortir vivement et reboucha tant bien que mal pour ne pas éveiller les soupçons.
Depuis ils n’ont cessé de parcourir les terres de l’Empire, reprenant contact avec les survivants du groupe de guerriers de la nuit qu’Alrik avait rejoint, et défendant l’Empire de ses ennemis, autant extérieurs qu’intérieurs.
Ils surveillèrent également les agissements des vampires mais, les siècles puis les millénaires, passant, une certaine lassitude gagna la majorité d’entre eux, ils n’avaient rien perdu de leu volonté de voir prospérer cet Empire pour lequel ils avaient condamnés leurs âmes, mais ils se demandaient si leur combat connaitrait une fin, et ce qu’ils feraient à cette fin.  
Alrik pensait que cette fin approchait et, alors qu’il descendait de cheval, étant arrivé à bon port, il observa à nouveau l’orbe vert monstrueux suspendu au-dessus d’eux, et se jura qu’il ne connaitrait pas de repos tant que les autres morts étaient inapaisés…


Bravo à celles et ceux ayant fini la lecture, et je me tiens à l'écoute de tout avis sur ces quelques lignes ou questions ^^

Crédits: Red Steel pour Alrik
Google Image "guerrière médiévale fantastique" pour Freya
Google Image "plaines mongoles" pour les plaines fertiles

Un vampire malgré lui, répurgateur à ses heures perdues ? Je ne peux qu’apprécier.

Un texte vraiment très bien écrit, un personnage très intéressant... un gros +1 !

Merci à toi ^^

Texte très sympa,mais même sans connaître (mais alors pas du tout) Battle, cela ne m'a pas gêné pour la lecture !

Et comme dit Le Seigneur Du Sang le personnage est très intéressant !

Merci à toi aussi Huron, content de savoir que mon texte est compréhensible même sans trop connaitre l'univers ^^

Très sympa, l'idée du personnage !!
J'ai bien aimé le moment de la bataille contre Nagash, aussi ! ^^

Merci Caddon Varn ^^

Le perso que tu as mis en lien, je l'ai découvert dans une vidéo de l'expo art ludique à Paris ; un disciple de legacy of Khaine?

Bon texte en tous les cas, travaillé et basé sur du fluff qui croustille sous la dent. Attention à la relecture et à certaines expressions ("Au fil du retour,  sous les soubresauts du chemin accidenté" .. "une vie en selle".. etc. ^^).

Sinon sympathique couple de vampires avec madame habillé de 2-3 coquilles de métal qui risque de prendre froid, mais dont peu de vampires ont de toute manière à en souffrir. Sympa aussi d'avoir inclus les illustrations en liens et en prenant finalement ton texte du roi des tombes à contre pied. La lecture n'en est que plus fluide!
Il faut cependant avoir des bases en fluff de battle et EoT pour saisir toutes les références de ce qui semble être un résumé d'une épopée plus vaste. (?)

Peu de dialogues cette fois, dommage.

- Ghost of Arkio - a écrit:Le perso que tu as mis en lien, je l'ai découvert dans une vidéo de l'expo art ludique à Paris ; un disciple de legacy of Khaine?

Je ne sais pas ,il vient de Blood Steel, c'est tout ce que je sais ^^' navré

Bon texte en tous les cas, travaillé et basé sur du fluff qui croustille sous la dent. Attention à la relecture et à certaines expressions ("Au fil du retour,  sous les soubresauts du chemin accidenté" .. "une vie en selle".. etc. ^^).

Oui, je vois ce que tu veux dire

Sinon sympathique couple de vampires avec madame habillé de 2-3 coquilles de métal qui risque de prendre froid, mais dont peu de vampires ont de toute manière à en souffrir.

Tout à fait, et ,ça fait longtemps, mais je n'ai pas souvenir que Freya était chaudement habillée dans les Times Of Legends ^^

Sympa aussi d'avoir inclus les illustrations en liens et en prenant finalement ton texte du roi des tombes à contre pied. La lecture n'en est que plus fluide!

J'ai hésité au début à mettre en spoiler, mais j'ai réalisé que ça revenais au même que sans spoiler donc bon ^^

Il faut cependant avoir des bases en fluff de battle et EoT pour saisir toutes les références de ce qui semble être un résumé d'une épopée plus vaste. (?)

Navré, j'ai toujours été plus intéressé par le fluff que par le jeu en lui-même ^^ donc ce que j'ai cité me parait "basique" comme tu le dis, mais cela empêche-t-il vraiment la compréhension générale du texte ?

Et oui, c'est un résumé, car bien que pas de limite de mots, je me voyais mal taper des pages et des pages, le tout avec une date butoir ^^'

Peu de dialogues cette fois, dommage.

Mais ne dit-on pas "un silence de mort" ?
Sinon, je ne l'imaginais pas trop loquace en effet, mais peut-être un jour, y aura-t-il l'aventure en version longue, pour voir si il est plus bavard qu'une tombe ^^

Soit pas navré, je le fais moi-même avec le fluff BA.
Mais en cherchant à résumer une chronique fluff très longue, on s'adresse plus à ceux qui la connaissent que ceux qui pourraient la découvrir, sans compter que la 1/2 du texte est consacré à la présentation des personnages.

M'enfin, c'est toujours plus facile à dire de l'extérieur!